EC
CM Philosophie ancienne
Description
Socrate, philosophe et citoyen d’Athènes
Qui était Socrate ? Il n’a pas écrit et n’a pas laissé d’œuvre de sa main pour la postérité. La question socratique, question consistant à retrouver le Socrate historique réel derrière toutes les traces qu’en ont produit ses contemporains, est tenue aujourd’hui pour insoluble. Les “témoignages” de Xénophon et d’Aristophane dans Les Nuées sont en contradiction sur plusieurs points entre eux et avec celui du philosophe Platon. Nul ne doute que le Socrate mis en scène dans les dialogues platoniciens ne soit l’œuvre de Platon. Mais inversement, Platon est d’une certaine manière l’œuvre de Socrate, et le “témoignage” platonicien, tout pénétré qu’il soit de fiction, ne conserve pas moins le droit d’être regardé comme l’énoncé d’une vérité profonde sur le personnage historique de Socrate. Car plus que tout autre témoignage, celui de Platon nous montre Socrate dans toute son ambivalence et son caractère insupportable : un homme juste, un citoyen loyal, un philosophe authentique, et tout à la fois un homme mordant, ironique, provocateur, qui pratique en toutes occasions l’art du renversement, renversement des rôles entre celui qui questionne et celui qui répond, entre celui qui sait et celui qui ne sait pas, entre celui qui domine et celui qui est dominé, entre celui qui désire et celui qui est désiré, entre celui qui juge et celui qui est jugé, renversement des opinions en leur contraire… Dans le portrait qu’en fait Platon, Socrate est un taon qui tourmente Athènes, un poisson-torpille qui paralyse, un Satyre qui envoûte, un sophiste plus sophiste que n’importe quel sophiste. Platon, tout en défendant Socrate, fait comprendre pourquoi il a été condamné et pourquoi il a eu une telle influence sur les aspirants à la philosophie.
Cette réflexion sur le personnage de Socrate sera l’occasion d’aborder divers courants intellectuels de l’Antiquité, notamment la sophistique et la rhétorique. Ce sera aussi l’occasion de traiter de la démocratie athénienne dont Socrate fut citoyen.
Or, à l'inverse d'Épicure qui nous enjoint de vivre caché et retiré, Zénon de Citium, le fondateur du stoïcisme, affirmait que le sage devait participer aux affaires publiques, sauf empêchement exceptionnel. Ainsi Sénèque, suivant la tradition stoïcienne, prônait l’implication dans les affaires lorsqu’il était au sommet de sa carrière (La tranquillité de l’âme), mais privilégiera la retraite philosophique lorsqu’il tombera en disgrâce. On peut y voir toutefois autre chose qu’un simple opportunisme puisque le philosophe tâche alors de montrer l’efficacité plus grande de la réflexion permise par l’otium (le loisir ou la retraite), qui reçoit cette fois sa préférence sur le negotium (les activités productives et profitables), mais encore sur le pouvoir qu’il a pu exercer au cœur de l’Empire. En effet, la réflexion sur les affaires humaines bénéficie ensuite à l’ensemble de l’humanité, or le philosophe stoïcien se pense comme citoyen du monde. Sénèque se console ainsi de ne plus pouvoir conseiller l’empereur romain en cherchant à faire rayonner la vertu de sa philosophie sur le genre humain. Loin d'être opposées, l'action et la contemplation se trouvent ainsi mêlées et pleinement réalisées au sein de l'activité intellectuelle. C’est cette position, d’abord reléguée comme une vie de seconde valeur dans La tranquillité de l’âme, qui est donc défendue par Sénèque quelques années plus tard dans La retraite, mais encore dans les Lettres à Lucilius.
Nous nous attacherons donc à lire certaines des œuvres de Sénèque où se lit particulièrement cette intrication entre la réflexion et la vie active. Pour ce faire, nous commencerons donc par dresser le portrait de Sénèque et son implication dans la vie politique romaine, avant de voir comment cette activité au cœur de pouvoir se traduit également en retour sur sa philosophie.
Compétences visées
Au terme de cette formation, l’étudiant est capable d’identifier les principaux courants de pensée de l’Antiquité, d’en restituer les enjeux métaphysiques, éthiques, politiques, et d’utiliser les concepts fondateurs de la philosophie dans sa réflexion personnelle et son approche du monde.
Informations complémentaires
Attention : les deux heures de ce cours doivent être complétées par au moins deux heures de cours suivies à la Faculté de Lettres ou la Faculté de Sciences historiques, au choix :
- module de grec ancien (cours de langue), au niveau qui convient pour chaque étudiant·e. Pour les grands débutants, il faut veiller à avoir pris le cours de grec dès le premier semestre ;
- module de latin (cours de langue), au niveau qui convient pour chaque étudiant·e. Pour les grands débutants, il faut veiller à avoir pris le cours de latin dès le premier semestre ;
- cours de littérature grecque ou de littérature latine choisie dans la liste des modules ouverts aux non-spécialistes à la Faculté de Lettres, disponibles ici (utiliser la colonne de gauche pour filtrer par composante et sélectionner « Faculté des lettres ») :
https://formations.unistra.fr/fr/recherche-ue-libre.html
- cours d’histoire antique (grecque ou romaine) choisi dans la liste des modules ouverts aux non-spécialistes à la Faculté de Sciences historiques :
https://histoire.unistra.fr/formation/cours-proposes-aux-etudiants-des-autres-filieres.
La compatibilité d’emploi du temps est garantie pour les modules de grec ancien seulement. Les étudiant·es doivent vérifier la compatibilité d’emploi du temps pour les autres cours avant de les choisir. Il est recommandé de demander préalablement l’approbation de l’enseignant·e concerné et d’informer Mme Merker.
Bibliographie
Bibliographie de base : titres devant être lus
Platon : on abordera au moins les dialogues suivants, disponibles en Pléiade (trad. Léon Robin), en GF (différents traducteurs) ou aux Belles Lettres en bilingue : Apologie de Socrate, Criton, Phédon, Protagoras, Gorgias. Il est recommandé, pour ne pas dire indispensable, de posséder en propre la plupart des dialogues de Platon, non seulement pour ce cours, mais plus largement pour les études de philosophie. Les éditions GF Flammarion (en volumes séparés) ont l’avantage de présenter une introduction consistante, des notes et une bibliographie. Attention : la compilation en un seul volume d’Œuvres complètes de ces volumes séparés ne contient pas les introductions ni les notes ; il vaut mieux acquérir les volumes séparés.
Aristophane, Les Nuées, traduction H. van Daele, Les Belles Lettres, 1934.
Bibliographie complémentaire : titres devant être au moins consultés
Xénophon, Les Mémorables, 3 volumes, texte établi et traduit par L.-A. Dorion, Paris, Les Belles Lettres, 2000-2011.
Les Sophistes (2 tomes), présentations et traductions sous la direction de J.-F. Pradeau, Paris, GF Flammarion, 2009.
Diogène Laërce, Vies et doctrines des philosophes illustres, traduction sous la direction de M.-O. Goulet-Cazé, La Pochothèque, 1999.
Dorion Louis-André, Socrate, PUF, coll. Que sais-je ?, 2004.
Dorion Louis-André, L’autre Socrate. Études sur les écrits socratiques de Xénophon, Paris, Les Belles Lettres, 2013.